Eh oui, il ne reste plus grand chose du campement. Samedi, sur cette même voie, c'est l'armée qui viendra parader à l'occasion de la fête nationale. Comme on ne rigole pas avec la nation, les tenants ont préféré vider les lieux. Il y aura encore ce vendredi une manifestation au centre-ville devant le Palais National, au cours de laquelle AMLO projette de nommer un gouvernement parallèle. Quant au président Vicente Fox, il a préféré aux dernières nouvelles de fêter l'Indépendance dans le Guanajuato, qui est à Fox ce que la Corrèze est à Chirac.

Alors, un petit bilan? Première constatation: le Mexique n'est pas l'Ukraine. Ce qui a pu marcher en Europe de l'est n'a pas fonctionné ici. C'est que contrairement à l'Ukraine, la transition démocratique était déjà amorcée depuis un certain bout de temps. Faire comme si on en était encore en 1999, sous le régime d'un parti unique corrompu jusqu'à la moelle, n'a pas convaincu grand monde. De moins en moins de monde, d'ailleurs, au fil des semaines qu'a duré le campement. Au lieu d'un vaste mouvement populaire qui allait déborder la capitale et garnir les principales villes de province de campements similaires, l'enthousiasme est retombé peu à peu. Dans ce sens, la stratégie du gouvernement a fonctionné: laisser s'assécher le mouvement, réduit à un phénomène capitalin.

Donc, tout faux? Pas vraiment. J'en discutais encore récemment avec Don Joaquín, un de nos chauffeurs de taxi habituels. Lui, il regrette amèrement que la présidence de Fox a eu pour résultat la division du pays, division dont héritera son successeur. Oui, je veux bien, mais je ne vois pas où est le problème; toutes nos petites démocraties européennes sont divisées, c'est même l'apanage de toute démocratie: un parti au pouvoir et une opposition. Il était bien entendu facile de s'unir contre un parti unique au pouvoir durant 70 ans. Maintenant, il s'agira de construire une opposition solide, avec ou sans AMLO, une opposition parlementaire essentiellement, et de faire évoluer les mentalités (facile à dire, je sais...).

Quand je suis passé sur le campement ce soir, les gens étaient en train de démonter les tentes, de plier les toiles, de charger des camionettes. Ça s'est passé dans le calme, comme tout ce qui s'est passé sur le campement depuis juillet. Il y a peut-être de la graine à prendre, qui sait.

Chansons finales à télécharger:

  • The Kinks - Dead End Street (mp3) - acheter
  • U2 - Until The End Of The World (mp3) - acheter
  • Skeeter Davis - The End Of The World (mp3) - acheter
  •  

    Rubrique "c'est quoi ces chansons?": Où il est prouvé que le mot de la fin peut inspirer des sentiments très divers. Ça va de l'observation acerbe d'un couple britannique qui habite au bout d'une rue à sens unique (les Kinks en 1966), en passant par l'optimisme entreprenant de U2 (1990, chanson du film homonyme de Wim Wenders), pour arriver à une bluette mélancolique, celle de Skeeter Davis (1963), qui se demande pourquoi le soleil continue de briller, puisque c'est la fin de monde (et son amoureux l'a quitté, eh oui).

    Retour à l'accueil