Quand on parle de « mexicanisation » d’un pays, comme dans un article récent de Newsweek à propos du Brésil, ça ne présage rien de bon. A l’heure où il est du dernier chic, selon une de mes étudiantes, d’avoir un narcotrafiquant dans ses relations, voilà où nous en sommes, au Mexique.

Pas étonnant, donc, que bon nombre de Mexicains n’aient pas trop envie de fêter le Bicentenaire de l’Indépendance, ni le Centenaire de la Révolution – même si malgré tout la fête populaire va battre son plein. Ceci dit, les réponses que j’ai obtenues après un petit sondage sont plutôt pessimistes : non, il n’y a rien à fêter, ou si peu, et on ferait mieux d’étudier l’histoire mexicaine pour comprendre comment on en est arrivé là : dans un pays où on se demande si la fameuse transition démocratique a vraiment eu lieu, et comment un néolibéralisme mal géré a pu laisser tant de gens sur le carreau. Sans parler des plus de 28000 morts victimes de la guerre des narcos, sans parler du trafic meurtrier des femmes et des migrants d’Amérique centrale. 

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Pourtant, les fêtes du Bicentenaire sont aussi l’occasion d’une réflexion sur l’identité. Celle-ci peut prendre des allures de patriotisme bon-enfant, naïf, véhiculé par les spots publicitaires gouvernementaux, la distribution gratuite de drapeaux, des paroles de l’hymne national. D’un autre côté, la réflexion se fait plus intense – et surtout plus critique : en témoignent une quantité énorme de livres publiés au cours des derniers mois, des expos d’art, de photos, des émissions de télévision comme « Discutamos México », des films (historiques, satires sociales, dessins animés). Ce sont peut-être là quelques signes porteurs d’espoir, qui confirment envers et contre tout une dynamique mexicaine, même si l’impression dominante est celle d’un pays coincé entre la langue de bois et la gueule de bois.

J’ignore comment la situation va évoluer, mais on aurait tort de croire que ces fêtes du Bicentenaire, c’est la fin des frijoles.  Je me rappelle d’un autre bicentenaire, celui de la Révolution française, 14 juillet 1989. Le soir, on avait eu droit à un défilé multicolore et multiculturel, concocté par Jean-Paul Goude, et pendant un court instant, on a pu avoir l’impression qu’après ce 14 juillet, plus rien d’intéressant n’allait se passer dans le monde pour le reste de l’année. C’était avant le 9 novembre.

 

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